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VAYETSE

LE MERVEILLEUX SAUT DE JACOB

Afin d'echapper a son frère Esaü qui le poursuit dans
l'intention de le
tuer, Jacob est contraint de quitter la terre d'Israël: "Et Jacob sortit
de Beershéva et alla vers Haran" (Genèse, XXVIII, 10).

Haran se trouve à l'extérieur des frontières
d'Israël. Or c'est en se
rendant à Haran que se produit un événement inattendu
: "Il heurta 'Le
Lieu' et il y passa la nuit car le soleil s 'était couché. Il
prit une pierre de
l'endroit, la mit sous sa tête et se coucha" (Genèse, XXVIII, I
l). Quel est
donc ce ":lieu" dont l'importance est telle qu'il est ainsi
mentionné dans la
Tora ?

En fait, c'est le 'lieu' de Dieu.

Rachi nous précise qu'il n'est pas stipulé dans ce verset de
quel lieu il
était question, mais nous savons qu'il s'agissait du mont Moriah
(I'actuel
mont du Temple à Jérusalem), à propos duquel il est
écrit, dans un autre
passage de la Bible: "Abraham vit le lieu de loin". En effet, lorsque
Abraham reçut l'ordre de sacrifier son fils Isaac, Dieu ne lui
précisa pas
sur quel emplacement devait intervenir ce sacrifice. Mais Abraham vit le
lieu de loin: "Le troisième jour, Abraham éleva ses yeux et
vit le lieu de
loin" (Genèse, XX11, 40). Comment a-t-il pu donc comprendre qu'il
s'agissait bien du mont Moriah ? C'est que, selon Rachi, notre patriarche
vit, grâce à son esprit prophétique, une nuée
envelopper la cime de la
montagne: il saisit d'emblée que le lieu vers lequel il se dirigeait
était
empreint de sainteté.

Deux générations plus tard, Jacob arrive lui aussi sur ce
même
emplacement. Nous ne pouvons manquer d'être surpris par la tournure
prise par cet évenement: Jacob est en route vers l'exil de Haran et,
soudain
au lieu d'y parvenir directement, voilà qu'il se retrouve dans
l'endroit le
plus saint et le plus central de la terre d'Israël. Nos sages
expliquent qu'il
fit alors un "saut miraculeux".

Comment interpreter cet épisode ?
Célèbre disciple du Rav Abraham Itshak Hacohen Kook et
déjà réputé
pour sa sagesse bien avant l'arrivée de ce dernier en Eretz
Israël, le rav
Harlap affirme que ce "bond miraculeux" ne doit pas être perçu
comme
l'illustration d'une simple curiosité géographique, mais bel
et bien comme
un événement extraordinaire dont la signification est
extrêmement
profonde: lorsque l'homme est imprégné d'une volonté
tenace et qu'il veut
absolument parvenir à quelque chose de très important à
ses yeux, il
cherche et trouve toujours l'option d'un "raccourci".

Ainsi, souvent, à force de volonté et de
ténacité, ce qui semblait éloigné
et difficile devient proche et plus accessible. Pour le rav Harlap, cet
épisode miraculeux de l'histoire de Jacob constitue une
préfiguration, sur
une échelle plus large, les tentatives du peuple d'Israël de
revenir vers sa
terre ancestrale, celle qui lui a été promise par l'Eternel.

Le message que reçoit Jacob est prémonitoire: I'amour de
notre peuple
pour Eretz Israël est si intense que nous assisterons, tout au long de ce
processus de retour vers la terre reçue en héritage par les
patriarches, à un
raccourci historique. Ainsi, avant la création de l'Etat
d'Israël, le projet
sioniste semblait-il être une véritable utopie. Tout paraissait impossible et
difficile. Mais impossible, dirons-nous, n'est pas juif ! Lorsque l'on
possède
une volonté tenace d'aboutir, on arrive à surmonter les
difficultes et à
résoudre les problèmes les plus insolubles.

Profondément amoureux d'Eretz Israël, Jacob franchit donc d'un seul
bond la distance qui le sépare du mont Moriah et, à peine
arrivé, il se
couche et s'assoupit. Bien qu'effectivement il ait de bonnes raisons
d'être
fatigué, remarquons pourtant qu'il est assez rare que la Tora
mentionne ce
genre de détails superflus. Or si le texte biblique stipule que Jacob
s'allonge et s'endort, là, sur les pierres du mont Moriah, c'est que
son geste
revêt une importance particulière.

Justement, dans son sommeil, I'Eternel lui apparaît et lui dit: "Je suis
l'Eternel, le Dieu d'Abraham ton père et le Dieu d'lsaac. Cette terre sur
laquelle tu es couché, Je te la donne à tol et à ta
postérité" (Genèse,
XXVIII, 13) On remarque donc que Dieu insiste sur le fait que Jacob s'est
bel et bien couché sur cette terre et nos commentateurs de s'etonner:
Seulement la terre sous laquelle il s'est allongé ? Autrement dit: ces
quelqlues coudées seraient-elles un héritage si important ?
Le Midrach
nous raconte que Dieu réalisa alors un nouveau miracle :Il rassembla
toute
la terre d'Israël et la placa sous Jacob (rapporté par Rachi).

Nous apprenons de ce récit que, pour ceux qui la désirent
ardemment,
la terre d Israël sera aussi facile à conquérir que ces
quatre coudées (Rachi,
ibid.). Car, lorsque l'on est attaché à Eretz Israël,
tout devient plus facile.
Abraham avait reçu précédemment un ordre:
"Lève-toi et promène-toi sur
cette terre car je te la donnerai" (Genèse, XIII, 17). Les Sages du Talmud
ont expliqué que cette "promenade" d'Abraham sur la Terre promise a
facilité, plus tard, sa conquête par les Enfants d'Israël
(Traité Baba Batra,
p. 100/a). En se promenant aux quatre coins d'Eretz Israël, il entendait
témoigner de son profond attachement. Or cet amour pour Israël
qui s'est
manifesté tout au long des générations sans jamais se
démentir, a facilité et
justifié notre reprise de possession de la terre ancestrale.

Et nous constatons qu'au fil des générations ce lien se
raffermit: si
Abraham ne faisait que se "promener" sur la terre d'Israël, son fils Isaac,
lui, y réside bel et bien, comme il est écrit: "Installe-toi
dans le pays"
(Genèse. XXVI, 2). Quant à Jacob, il va jusqu'à se
coucher sur ce sol,
manifestant ainsi un attachement sans borne.

Nous comprenons mieux maintenant cette multiplicahon de détails
fournis par la Tora sur cet épisode: "Et il prit des pierres du lieu
et il les
plaça sous sa tête, et il se coucha en ce lieu". Le
commentateur "Tzror
Hamor" (contemporain de l'inquisition en Espagne) affirme que c'est
justement en raison de son amour pour les pierres d'Israël que Jacob s'en
est servi comme oreiller ! Et notre commentateur de rapprocher cette
situation du verset: "Car tes serviteurs ont désiré ces
pierres et sont
amoureux de sa poussière" (Psaumes, 102, 15).

Jacob est donc amoureux de la terre et des pierres, et il les "embrasse".
A la fin du livre du Kouzari, on touche au problème de la venue du
Messie. :Rabbi Yéhouda Halévi affirme que le Messie ne viendra que
lorsque le peuple sera devenu follement amoureux de Jérusalem, comme il
est écrit: "Lève-toi et tu prendras en miséricorde Sion
car le temps est
venu, car tes serviteurs ont voulu ses pierres et sont amoureux de sa
poussière" (ibid, 14, 165). L'amour du peuple juif pour la terre
d'Israël a
ainsi la faculté de renforcer également l'attachement de Dieu
pour cette
terre: I'amour d"'en-bas " éveille l'amour d"'en-haut" .

Nos Sages racontent qu'en vertu du verset précité, rabbi Hyia Bar
Gamda avait l'habitude de se rouler dans la poussière d'Israël
et que rabbi
Abba embrassait quant à lui les rochers de la cité d'Akko
(Traité
talmudique Ketouvot, p. 112, a/b). Lorsque le Talmud énonce aussi ce
fameux verset, Rachi, de manière très exceptionnelle, ne fait que le
recopier sans y ajouter nulle autre explication dans son commentaire
traditionnel ! Selon le Gaon de Vilna, le grand commentateur a agi de la
sorte car il avait parfaitement compris que nos deux Sages respectaient
l'essence même de ce verset au plus profond de leur être et qu'ils
réagissaient donc avec un amour illimité.

On demanda à Rabbi Yeoshoua Mikoutna s'il etait judicieux de
promouvoir un mouvement d'alya vers Eretz Israël afin que le peuple se
décide à y monter, à s'y installer et à y
construire. Il répondit positivement
et inséra dans son explication un élément messianique:
un profond désir
anime en fait toutes les composantes de notre peuple. Aucun doute à ce
sujet: toutes sont animées d'un profond et sincère amour
d'Eretz Israël ! Et
par conséquent la lumière de la Guéoula (la
Rédemption) commence à
apparaître (Yéchouot Molko, Yoré Déa responsum 66).

Celui qui aime profondément et sincèrement la terre
d'Israël sait plus
facilement surmonter les obstacles qui pourraient se dresser dans la
concrétisation de son amour.