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SOUCCOT (I)

LE TEMPS DE LA JOIE

Yom Kippour est traditiommellement considéré comme le jour de
ressourcement spirituel par excellence des êtres humains et comme
une coupure avec le monde matériel toujours "prioritaire" pendant
le reste de l'année. Par contre, la fête de Souccot sera
marquée par le
retour de l'homme vers cette vie matérielle apres le summum de
sainteté et de spiritualité atteint à Kippour.

Immédiatement à l'issue du jeûne suprême, l'homme
juif a pour
obligation de construire de ses propres mains une cabane recouverte de
feuillage. Et quatre jours plus tard, dans cette atmosphère
réjouie et
solennelle de Souccot, il devra brandir le bouquet des "quatre espèces" de
plantes qui sont les plus douces et les plus agréables de la
création.

Maïmonide, qui manifeste une opposition farouche à toute abstinence
maladive, insiste sur le fait oue Dieu ne dédaigne pas le corps humain.
C'est pourquoi le Maître du monde ne nous incite pas à
annihiler les
tendances naturelles existant en nous (voir le Traité sur les Huit
Chapitres, IV). S'il est exact de souligner que Yom Kippour est un jour de
distanciation praroxystique d'avec la nature foncière de l'être
humain, il
constitue avant tout un moment intemporel servant en fait de passerelle
d'un temps à l'autre.

Mais à Souccot, nous revenons vers la vie, cette vie calme de tous les
jours. Dans son ouvrage Orot ha-Teshouva - "Les lueurs de la Teshouva"
(chap. IX ) - le Rav Abraham Itshak Hacohen Kook utilise la parabole
suivante: "Un homme malade doit suivre un traitement médical de choc,
qui permet de détruire le poison menacant son existence, mais qui
par là-
même l'affaiblit considérablement". Or c'est bien ce qui nous
arrive
pendant la période des "Dix jours de pénitence", et
même durant le mois
d'Eloul .

A partir de Rosh Hashana, explique le Rav, ces austères journées
donnent à l'homme l'occasion de se débarrasser des "maladies"
qui se sont
incrustées en lui durant toute l'année. Mais en même
temps cette thérapie
est éprouvante et affaiblit le puissant désir de vivre. C'est
pourquoi après
ces jours le crainte et d'anxiété, il nous faut retrouver une
certaine joie de
vivre et rebâtir ainsi les fondements de notre nature humaine.

C'est que la Teshouva purifie les hommes, affine l'esprit et sait extraire
le bien des actes humains ! Or cet effort de "retour" vers Dieu contient
nécessairement en lui-même une certaine faiblesse à
laquelle même
l'homme le plus fort ne peut échapper.

Lorsque l'on fait dépendre la force de vivre du seul
dégoût intérieur à
l'égard du péché, la volonté de retour vers le
bien, elle aussi, s'affaiblit... La
purification morale est une épreuve qu'il faut donc apprendre
à surmonter.
C'est pourquoi, après Kippour, nous redécouvrons les jours
remplis de
joies saintes en régénérant notre volonté et
nos convictions en faveur d'une
vie emplie de pureté et de bien-être. C'est seulement alors
que la Teshouva
annoncée à Kippour se concrétise pleinement.

A Souccot, nous revenons donc vers la vie et ce n'est pas par hasard si
la valeur numénque du mot loulav (la feuille de palmier)
s'élevant à 68, est
égale à celle du mot haïm (la vie), et presque semblable à celle du mot
hadas (le myrte) qui atteint 69.

Maïmonide s'oppose à toute interprétabon
homilétique du sens des
"quatre espèces" que l'on agite à Souccot. Ou plutôt, il
considère que ces
commentaires sont profondément vrais, mais ne prétendent pas
révéler le
sens authentique du texte: les quatre espèces, explique-t-il,
renvoient à la
gaieté et à la joie éprouvée par les
Hébreux lorsqu'ils quittèrent le désert,
qui fut pour eux "un lieu impropre aux semences, sans figuiers, sans
vigne, ni grenadiers, ni eau à boire" (Nombres XX, 5) - pour arriver
enfin
dans une région où poussaient des arbres fruitiers et
où coulaient des
rivières.

Pour en célébrer le souvenir, on prenait le fruit le plus
beau et le plus
parfumé de ces lieux, I'étrog (cédrat), des feuillages
et des branchages
parmi les plus belles verdures - à savoir les saules des
rivières, le myrte et
la feuille de palmier. Ces quatre espèces se distinguaient par trois
particularités: elles étaient très répandues en
Terre d'Israël, de sorte que
chacun pouvait se les procurer; elles étaient d'un bel aspect et
dotées d'une
bonne odeur (sauf le saule); et elles conservent leur fraîcheur
pendant une
semaine, qualité que l'on ne retrouve pas pour d'autres
espèces (Guide des
Egarés, vol. 3, chap. 43).

Ces quatre espèces sont donc les plus belles, les plus
agréables et les
plus odonférantes qu'il soit, et elles nous remplissent de joie
lorsque nous
avons le mérite de resider en Terre d'Israël. Elles seules nous
permettent
de retrouver les forces de la vie et de ses joies.

Il est également intéressant de remarquer que ces
espèces deviennent
inutilisables dès qu'elles se dessèchent. Elles doivent donc rester
"vivantes". Le Talmud de Jerusalem nous explique pourquoi, en rapportant
le verset des Psaumes suivant: "Les morts ne sauraient louer Dieu". A
Souccot, en un mot, nous revenons à la vie.

L'attachement le plus profond à Dieu n'est nullement contradictoire
avec les forces de la vie et de la nature: "Et vous qui êtes
attachés à Dieu,
vous êtes tous vivants aujourd'hui" (Deutéronome, lV, 4). Plus
on est
attaché à Dieu, plus on manifeste de vitalité, et plus
on se sent plein
d'harmonie avec soi-même et avec la profondeur authentique de son
être
propre .

L'attachement à Dieu et le respect de la Tora et des commandements ne
viennent pas priver les êtres humains de bonheur, en leur imposant
artificiellement un mode de vie étranger. Ils n'entendent au
contraire que
dévoiler à l'homme la profondeur secrète de son être.

Nos Sages racontent dans le Talmud qu'à la fin des temps, au jour du
Jugement dernier, Dieu reprochera aux nations de ne s'être pas
livrées -
contrairement au peuple d'Israël - au culte divin et au respect des
commandements. Alors les nations de la terre tenteront de se disculper en
disant: "C'est injuste, ordonne-nous une mitsva, et tu verras que nous
l'accomplirons". Dieu rétorquera alors qu'il est "trop tard": "Celui
qui a
trimé le vendredi aura de quoi manger le shabbat, et celui qui n'aura pas
trimé le vendredi, que prendra-t-il à manger le shabbat ?"
dit un proverbe
talmudique.

Cependant, Dieu accordera une nouvelle "chance" aux nations: "J'ai un
commandement facile à vous proposer: la soucca ! Quoi de plus
aisé que
de construire une cabane... " Relevant le défi, les nations
construiront leurs
cabanes sur le toit de leurs maisons. Dieu décidant alors de faire
briller un
puissant soleil, chaque nation sortira de sa soucca en la frappant du pied !
(Traité Avoda Zara, p. 3 /a).

Qu'y a-t-il de surprenant a cela ? N'est-il pas écrit que celui qui
est en
peine, se trouve dispensé de soucca ? Mais si telle nation
était gênée
d'habiter sous sa soucca, elle pouvait la quitter sans aucune protestation et
sans avoir besoin de la frapper ! En fait, ce commandement porte un tort
aux non-Juifs au plan financier, usurpe leur bonbeur et leur joie
intérieure
et ils sont donc incapables de ressentir une quelconque harmonie
intérieure
en l'exécutant. C'est pourquoi, dès que le moindre
problème surgit, ils se
rebellent contre Dieu ! Or, il n'en n'est pas de même pour le peuple
juif qui
se considère et se sent intrinsèquement lié aux
préceptes divins: ne
ressent-il pas profondément que cette mitsva de la soucca est "naturelle"
pour lui ?

Ce n'est pas un hasard si c'est bien à propos de la fête de
Souccot et des
lois sur le loulav que Maïmonide fait état du fameux principe
selon lequel
"il faut servir Dieu dans la joie". Il évoque ainsi en detail les
joyeuses
festivités qui accompagnaient la "Simhat Beit ha-Shoeva" - la joie du
puisage: cette mitsva qui se déroulait dans l'enceinte du Temple
atteignait
en effet des sommets de réjouissances.

Or ce qui rendait cette joie encore plus unique était le fait
qu'à cette
occasion, ce n'était pas les ignares, mais les grands sages
d'Israël, les chefs
du Sanhédrin, les vieillards et les hommes de bien qui dansaient et se
réjouissaient à un haut niveau spirituel. Quant aux hommes et
aux femmes
du peuple, ils se rendaient au Temple pour regarder et s'émerveiller
(Lois
sur le loulav, Chap. Vlll, alinéa 14).

Après avoir décrit cette joie si propre à Souccot,
Maïmonide généralise:
selon lui, il ne suffit pas seulement d'accomplir les commandements divins,
il convient de le faire avec joie. Quant au commentateur du Maïmonide, le
Maguid Michné, il se demande comment il est possible de se
réjouir en
observant certains de nos préceptes qui sont particulièrement
pénibles. En
fait, il s'agit d'une joie intérieure et beaucoup plus authentique:
celle qui
illumine la personne humaine lorsqu'elle fait le bien et accomplit la
volonté
divine.

N'est-ce pas là, en fin de compte, que réside la profonde
finalité de la
vie humaine ?