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--MATOT-MASSAE

CONFORT MATERIEL ET COMBAT SIONISTE

"Les enfants de Réuven et ceux de Gad possédaient de nombreux
troupeaux, très considérables.... Ils vinrent parler à
Moïse en ces
termes: '.. Ce pays que l'Eternel a fait succomber devant les Enfants
d'Israël est propice au bétail, or tes serviteurs ont du
bétail. Si nous
avons trouvé grâce à tes yeux, que ce pays soit
donné en priorité à tes
serviteurs; ne nous fais point traverser le Jourdain !' ... " (Nombres,
XXXII, 1-5).

A notre époque, il est relativement fréquent d'entendre
quelques-uns
parmi les brillants orateurs "amants de Sion", prêcher en faveur de
l'enrôlement dans les forces de Tsahal, ou bien encourager le
judaïsme de
la diaspora à faire son aliya en Terre sainte, et réaffirmer
avec fermeté
notre "droit éternel" à conserver, sans la moindre
concession, I'intégralité
de la Terre d'Israël. Et souvent ces orateurs font une analogie entre
l'épisode cité en exergue et la "faute des explorateurs" -
une comparaison à
propos de laquelle il est légitime de se poser des questions. Car en
effet,
les explorateurs refusaient toute attache avec la terre d'Israël,
alors que de
nos jours, ceux qui acceptent des concessions territonales, sont cependant
prêts à se dévouer pour le reste du pays.

Pourtant, il convient de replacer ce débat dans son contexte: les
orateurs que nous avons évoqués ne sont en effet pas les
premiers à avoir
risqué la comparaison entre la faiblesse sioniste, et la
médisance des
explorateurs. Ils n'ont tout simplement fait là que reprendre les
propos de
Moïse aux deux tribus de Gad et Réuven qui réclamaient
des étendues de
terre en Transjordanie pour des raisons purement matérialistes Car,
à la
demande apparemment innocente de ces tribus, Moïse réagit avec une
extrême véhémence: "Quoi! Vos frères iraient au
combat et vous, vous
demeureriez lci ?! Pourquoi voulez-vous décourager les Enfants
d'Israël
de marcher vers le pays que leur a donné I'Eternel ? Ainsi firent vos
pères alors que je les envoyai de Kadesh Barnéa pour explorer
ce pays
lls montèrent dans la vallée d 'Eshkol, ils virent le pays ;
puis ils
découragèrent les Enfants d'Israël de se rendre au pays
que leur avait
donné I'Eternel.. Et voici vous prenez la place de vos pères,
germes de
pécheurs, pour ajouter encore à la colère de Dieu
contre Israël !"
(Nombres, XX, 6-14).

Pourtant, une lecture plus approfondie devrait faire apparaître un point
capital qui va remettre en question toute la comparaison faite à
l'origine par
Moïse. Alors qu'au travers de leurs propos malfaisants, les explorateurs
avaient exprimé leur mépris de la terre d'Israël, les
membres des deux
tribus souhaitaient, eux, ardemment posséder un héritage en
Eretz Israël,
et ne semblaient pas contester le principe même de l'ordonnancement du
peuple juif sur sa terre. Mais, pour des raisons économiques et
"professionnelles", ils avaient choisi de réclamer des terres se
situant de
l'autre côté du Jourdain !

Une réponse se dégage à ce dilemme: de même que
l'amour d'un
homme pour sa femme ne saurait être partagé, I'amour de la
terre d'Israël
doit impérativement demeurer entier. Tout partage serait assimilable à
l'attitude d'un homme qui resterait profondément attaché
à une partie des
six cent treize commandements et qui se permettrait certaines "libertés"
avec une autre partie d'entre eux.

Par exemple, quelqu'un qui ne respecterait le shabbat que partiellement,
ne pourrait etre considéré comme un "shomer shabbat" (un
observant du
shabbat) à part entière. De même, celui qui aimerait
passionnément ume
partie du peuple juif, mais qui en hairait une seconde, ne pourrait être
qualifié d'authentique amoureux de notre peuple. A plus forte raison ne
peut-il y avoir de demi-mesure lorsqu'il s'agit de l'amour du peuple juif
pour sa terre !

Si les enfants de Gad et de Réuven étaient effectivement
attachés de
manière sincère à la patrie d'Eretz Israël, ils
n'en demeuraient pas moins
prêts à se désolidariser de leurs frères qui
s'apprêtaient à partir à la
conquête du pays. C'est pourquoi l'on considère qu'ils
étaient atteints du
dangereux "virus" qui avait, en son temps, frappé les douze explorateurs.

De surcroît, comme nous l'avons déjà
évoqué plus haut, ces deux tribus
et demie accordaient une prionté extrême aux activités
économiques. Et
nos Sages vont même jusqu'à dire qu'ils n'aimaient que trop
leur argent

"Nous construirons des clôtures pour nos troupeaux et des villes pour
nos enfants" (Nombres, XXXI, 16). D'après l'ordre des arguments
exposés dans ce verset, les affaires économiques avaient
même priorité sur
I'éducation des enfants. C'est pourquoi Moïse corige
immédiatement leurs
propos en insistant sur l'essentiel au détriment de l'accessoire:
"Construisez-vous des villes pour vos enfants et des enclos pour vos
troupeaux", répond-il, comme le remarque Rachi en citant le Midrash
Rabba (XX, 91).

Les membres de ces tribus plaçaient donc leur confort personnel au-
dessus de leur devoir national d'assurer la présence et la
souveraineté du
peuple juif sur toute la terre d'Israël. De même, ils
plaçaient leurs
problèmes économiques et leurs intérêts
matériels à un niveau bien
supérieur à celui de l'éducation des enfants.

Tous sommes donc en présence d'une double faiblesse spirituelle que
Moïse ne manque pas de relever sur un ton de reproche: "Quoi ! Donc,
vos frères iront à la guerre, et vous, vous resterez là ! "

Pourtant la logique et une certaine honnêteté historique nous
obligent à
reconnaître que, finalement, ils acceptèrent ces reproches de
Moïse et
participèrent pleinement à la guerre d"'Indépendance"
et de conquête de la
terre d'Israël, se portant même, non sans un certain courage,
aux premières
lignes .

S'il en est ainsi, tout cet episode n'est-il pas, en fait, une sorte de
malentendu rapidement réglé grâce à un dialogue
fructueux entre Moïse et
les responsables de ces tribus ?

Or les choses ne sont pas si simples, car avant de se rendre à
l'évidence
qu'ils devraient combattre aux côtés de leurs frères,
ils avaient eu la ferme
intention de se désolidariser d'eux, de ne pas prendre part à
l'effort
national, et même de donner priorité à leurs troupeaux
au détriment de leur
descendance .

Cette attitude originelle témoigne bel et bien d'une profonde
incompréhension des valeurs essentielles inhérentes à
la Nation. On décèle
chez les membres de ces tribus une volonté déliberée
de brûler les étapes
qui risque de les faire sombrer dans le "culte de l'immédiat". Et l'on
constate, par ailleurs, que la punition face à un tel comportement finit par
arriver puisque, selon le Midrash Rabba (Bamidbar Rabba, XX, 9), ces
deux tribus et demie seront plus tard les premières à
être frappées par la
chute du royaume d'Israël, comme il est écrit: "Et le Dieu d
'Israël réveilla
l 'esprit du roi d 'Assyrie et celui de Tiglat Pillesser, roi de Syrie, et
il exila
le Réubenite, le Gadite et la moihé de la tribu
ménachite" , Chroniques,
V, 29)

Il ne s'agit pas là d'un hasard, ni d'un concours de circonstances, mais
bien d'un évènement programmé par l'esprit divin, qui
punit ainsi les
descendants de ces tribus pour leur attitude egoïste. D'après
nos Sages,
cette faiblesse idéologique fut la cause principale de
l'écroulement de Gad
et Réuven: "Des gens matérialistes qui étaient riches,
qui possédaient
des troupeaux et qui aimaient leur argent" (Bamidbar Rabba, XX, 17).

Plus tard, losque la guerre fut terminée et que Gad, Réuven
et la demi-
tribu de Ménaché furent revenus dans leurs foyers, ils
construisirent un
"grand autel", comme cela est stipulé dans le Livre de Josué
(X7II, 9). Cet
acte éveilla la suspicion des Enfants d'Israël qui partirent en
guerre contre
eux, pensant qu'ils avaient l'intention de procéder sur leur
territoire à des
sacrifices - car ils considéraient cette tentative comme un acte de
rébellion
contre la centralité spirituelle du culte (voir Josué, XXI,
16-20).

Mais cet évènement trouva une heureuse fin puisque les
sécessionnistes
purent expliquer la pureté de leurs intentions: en édifiant
cet autel, ils
avaient tout simplement voulu que les autres tribus ne les considèrent
justement pas comme exclus du peuple d'Israël.

Néanmoins, les autres tribus les soupçonnèrent de se
détacher du
service divin central et de se construire une sorte de "religion autonome",
alors que l'intention de Réuven et Gad en construisant cet autel
était
précisément de ne pas se sentir séparés du
reste de la nation.

Dans son commentaire sur le livre de Josué, Rabbi Lévi Ben
Gershon -
surnommé Gersonide - explique qu'il s'agissait en fait, de la part
des deux
tribus et demie, d'une réaction de profond remords quant à
leur conduite
passée. Elles s'étaient trop consacrées aux troupeaux,
alors qu'il n'est point
convenable que l'on soit ainsi mobilisé par des
intérêts particuliers avant
d'avoir profondément étudié la question sous tous ses
angles. Ce n'est
qu'après avoir donné la préséance à leurs
activités d'élevage, qu'ils émirent
ensuite des craintes quant à la possibilité de voir leurs
enfants s'éloigner de
Dieu et de la voie tracée par la Tora. Car il est évident que
cet attachement
profond à l'argent a favorise leur éloignement spirituel de Dieu.

Rabbi Itzhak Abravanel remarque que, dans tous leurs propos, le Nom
de Dieu n'est pas mentionné une seule fois (voir ibid, CXXII, 16-19). Ils
dirent: "Et nous, nous irons en armes résolument devant les Enfants
d'Israël" (17). Et Moïse de coriger: "Si vous accomplissez cette
chose, si
vous allez de l'avant devant l'Eternel pour le combat, et que chaque
éclaireur se porte devant Dieu et que la terre soit conquise devant Dieu
... Et vous reviendrez et vous serez quittes devant Dieu et devant Israël.
Et cette terre vous sera [attribuée] en territoire devant Dieu" (20-22).

Il s'agit là d'une profonde mise en garde contre le risque de sombrer
dans des intérêts passagers et dans le culte de
l'immédiat, au détriment des
véritables valeurs nationales et spirituelles.

Mais, aujourd'hui, la gravité et l'ampleur des défis de notre
époque
assurent pleinement la réussite d'Israël: le peuple juif est fort et
profomdément attaché à sa terre. Certes, il est
parfois sujet à certaines
faiblesses, mais, dans son for intérieur, brille un profond amour pour la
terre d'Israël.

Ne suffit-il pas de trouver l'étincelle propice à
réveiller cet amour pour
Sion qui repose dans l'âme de chaque juif ?