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BERECHIT

"ET QUE LA LUMIERE SOIT..."

"Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre", (Genèse, 1, 1):
nous comprenons à la lecture de ce premier verset de la Tora que
Dieu a brusquement créé une réalité à
partir d'un neant. Pourtant
nos Sages nous font remarquer dans le traité Avot - les "Maximes de
nos Pères" (V, 1) - que le monde a été
créé par dix paroles. Il
pourrait donc aussi s'agir d'une création progressive.

A dix reprises, on peut lire dans la Genèse: "Et Dieu parla". Ce fut le
cas à propos de la création de la lumière, de la
séparation des eaux, etc.
C'est alors que les Sages se posent une question inévitable: est-ce que,
dans Sa toute puissance, Dieu n'aurait pas pu créer le monde le plus
parfait
grâce à une seule et unique parole ?

La réponse ne fait bien sûr aucun doute: s'll le souhaite,
Dieu peut
créer d'emblée un monde de perfection. Mais Son désir
est autre  l'Eternel
a voulu façonner le monde graduellement afin, nous disent les rabbins, de
"donner un salaire aux justes qui font exister le monde qui a
été créé par
des paroles". Car un monde créé dans sa toute perfection
empêcherait
l'être humain d'être partie prenante du plus grand acte qui
puisse être: celui
de la création.

On relate à ce propos l'histoire d'un Romain qui posa un jour la question
suivante à un Sage: "Qu'y a-t-il de plus beau: I'¦uvre humaine ou
l'¦uvre divine ?" A sa grande stupéfaction, le Sage lui
répondit: "L'¦uvre
humaine". Il s'expliqua en affirmant que cette comparaison en forme
d'altenative équivalait à celles où l'on comparait le
lin et le vêtement ou
bien le froment et le pain. Le Romain reconnut la sagesse du rabbinn mais
engagea un nouveau dialogue en disant: "Pourquoi pratiquez-vous la
circoncision ? Est-ce que le corps humain n'a pas justement
été créé déjà
parfait ?" Le Sage lui répliqua que c'était là une
question bel et bien
importante et il répondit: "L'Éternel a créé des
choses afin qu'elles soient
perfectionnées par l'homme, comme nous le disons chaque vendredi soir
dans le Kiddouch - 'Dieu a crée les choses afin qu'elles soient
faites' !"

Ces dix paroles divines ont donc hissé le monde du néant vers les
niveaux successifs de la création. Mais Dieu a confié le dernier
mouvement à l'homme et lui a donné la force intérieure
d'accomplir jusqu'à
son terme ce long processus.

Une fois de plus, nous pourrions avoir tendance à considérer cette
création comme une série d'à-coups et comme dix
brusques paroles
divines ayant opéré de soudaines apparitions. Or cela ne
serait pas
conforme à la lecture ésotérique du texte.

En effet, les Kabbalistes nous révèlent que le
phénomène mentionné par
le verset "la lumière fut" n'a pas été un brusque
passage de l'obscurité à la
lumière, mais un long processus. Le passage du néant à
l'être s'est donc
opéré grâce à une infinité
d'intermédiaires. A la fin du volume de la
Michna Nezihn, dans une longue analyse appelée "Or Hahama", (la
lumière solaire), Rabbi Israël Lifchitz, le "Tiferet
Israël' - auteur du
célèbre commentaire de la Mishna: "Tiferet Israël" - brosse une large
fresque de l'apparition du monde. Il rapporte les propos du célèbre
Midrash (commentaire homilétique) selon lequel Dieu avait construit des
mondes puis, insatisfait, les avait détruits... "Et chaque monde
etait plus
perfectionné que le précédent"

Le projet divin serait donc conçu de telle sorte que l'apparition de
chaque monde exigerait au préalable la disparition du
précédent. La
destruction d'un monde serait en fait le prélude à la
création d'un monde
meilleur. Selon cette interprétation, notre monde n'aurait donc pas
été le
premier, mais bien le dernier à être creé: il serait
donc un monde que Dieu
aurait considéré comme apte à recevoir la
lumière divine et la Tora, et à
permettre l'apparition de la conscience humaine. Cependant, même ce
monde fut loin de la perfection, puisqu'il a dû être englouti
sous les eaux
du déluge et fut rebâti par Dieu à partir de Noé
qui représente, à jamais, la
véritable source de l'humanité.

Rabbi Israël Lifchitz rapporte egalement les moqueries des hommes de
science qui, tout au long des siècles, ne cessèrent de
prétendre que tous
ces discours faisant état de mondes précédents
étaient "insensés". D'après
eux, les croyants n'avaient d'autres issues que de se réfugier dans
leur foi
car ils étaient incapables de répondre à ces critiques
à l'aide d'arguments
scientifiques.

"Et voici, raconte le rav Lifchitz, nous faisant part de sa profonde joie
à
la lumière d'une nouvelle découverte: le mammouth, imposant par sa
taille ef son envergure, est assurémenf le vestige d'un cycle
précédent
dont l'histoire ne possède aucun souvenir". En d'autres termes,
même les
scientiiques en viennent finalement à reconnaître la
véracité des paroles de
nos Sages !

Quoi qu'il en soit, Dieu aurait pu assurément créer notre
monde sans le
faire précéder de différents bouleversements
cyclo-cosmiques. Il aurait pu
faire en sorte que l'homme naisse adulte et que l'histoire de notre peuple
advienne d'emblée au stade de son aboubssement messianique.

Mais le Maître du monde a choisi de faire apparaître les
créations de ce
monde de façon progressive. Entre les ténèbres et la
lumière éclatante, il
existe des zones de clair-obscur où le plein jour et la nuit combattent
férocement. L'homme est appelé à participer à
ce combat. Ceci est vrai tant
pour l'ongine du monde que pour la résurrection du peuple d'IIsrael,
cette
nouvelle genèse de notre peuple qui a lieu sous nos yeux avec tant de
difficultés.

Le Ramhal, Rabbi Moshé Haïm Luzzato, nous explique ainsi que le
monde naît au plus bas et se hisse vers les hauteurs les plus sublimes:
"C'est un monde déchiré et fracassé, un monde de vases
brisés - qelim
Chevourim' - mais ces vases peuvent être restaurés". C'est en
fait grâce à
la moralité humaine que le monde du désordre - "Olam
ha-Tohou" - peut
se transformer en "monde de la reparation" - "Olam ha-Tikoun". Ainsi,
comme le disent les Sages, I'homme devient-il un associe de Dieu dans
l'¦uvre de la création. Chaque homme qui perçoit les choses
dans leur
vérité ultime et qui participe par un effort spirituel et
intellectuel à leur
concréisation devient, de ce fait, le vecteur de la volonté
divine dans la
construction du monde.

On peut toutefois concéder que l'imagination populaire s'accommode
plus aisément d'une création faite d'apparitions soudaines:
il lui est oifficile
de concevoir un long et laborieux processus évolutif, surtout
lorsque celui-
ci implique un effort continu.

Cette affirmation est particulièrement pertinente lorsqu'il s'agit de la
Guéoula, cette "Délivrance" tant espérée. Mais
il faut cependant
reconnaître que nous avons pu apprendre, surtout au cours des
dermères
générations, à nous habituer à cette situation:
même si nombre de nos
coréligionnaires restent déçus par la lenteur avec
laquelle se dévoile cette
délivrance, ne savons-nous pas davantage aujourd'hui adapter cette
pensée
évolutive au phénomène même de la Guéoula
qui se déroule sous nos
yeux?

Il ne faudrait surtout pas, comme certains sont tentés de le faire,
voir là
une quelconque faiblesse divine ou, pire encore, une sorte
d'imcapacité du
Créateur de résoudre instantanement tous les problemes
surgissant sur la
voie de la Gueoula I Au contraire, nous enseigne le Rav Kook, c'est là le
signe de la puissance de Dieu qui évite soigneusnent d'intervenir pour
bouleverser le processus naturel. S'il en était autrement, nous pourrions
croire que le Créateur ne peut plus influencer de l'intérieur
sur ce processus.
Or c'est bien ansi qu'll agit : Dieu intervient au-dedans meme du
processus naturel, lui insuffle la vie et l'infléchit
délicatement vers sa
finalité.

Le Maitre de l'univers apparait donc comme une âmee cachée, qui est
celle à la fois de la Nature et de l'histoire, une âme qui
donne à ce
processus une poussée ascensionnelle et constante, afin de le fire
parverir
au sommet.