Rencontre avec David d’Or

« Il faut essayer de modifier la vision que les Français ont d’Israël et la musique est un bon moyen de le faire »
publié le dimanche 27 juin 2004
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David d’Or porte bien son nom, « une voix en or » au service de toutes les musiques. Après son interprétation de Carmina Burana, dirigé par Zubin Mehta avec l’Orchestre symphonique de Jérusalem, il signe ses premières compositions, fusion de pop et de classique. Nommé meilleur chanteur de l’année en Israël, il est alors choisi pour défendre les couleurs d’Israël lors de l’Eurovision 2004. David d’Or, après quatre albums de platine et de nombreux concerts aux Etats-Unis et en Europe, a choisi la France pour un concert exceptionnel, le 27 juin 2004, au Bataclan. C’est le véritable visage d’Israël que cet artiste veut montrer à la France, un pays aux multiples cultures, un pays de tolérance et d’universalité.

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Actualité Juive : David d’Or, vous êtes un artiste très populaire en Israël, pourquoi avoir choisi la France pour votre prochain concert ?

David d’Or : Je travaille dans le monde entier et j’avais envie de venir en France pour montrer le véritable visage d’Israël. Il n’y a pas que l’armée et le conflit israélo-palestinien ! Il y a de nombreux artistes talentueux dont on ne parle jamais en France. Je viens délivrer un message de Paix et de Beauté. La musique est un langage universel et n’a pas de frontière. La musique s’adresse à tous ceux qui voudront m’écouter avec leur cœur.

A.J. : Vous êtes contre-ténor, votre musique est qualifiée d’ethnique, parlez-nous de vos influences et de votre parcours musical...

D.D. : Je chante depuis toujours. J’ai participé à de nombreux concours, mais j’ai mis beaucoup de temps à accepter ma voix aiguë et à l’utiliser. Il y a peu de contre-ténor en Israël et j’avais peur de la réaction du public. Ma musique est un mélange de pop et de classique, mais je ne veux pas la définir parce que je déteste les frontières, à tous les niveaux, et je ne veux pas d’étiquette. Mes compositions sont un mélange de toutes mes influences musicales et de toutes mes origines familiales. J’aime le Classique, le Jazz, la Pop... La musique doit me toucher pour me plaire. La musique doit réunir nos cœurs et non marquer nos différences.

A.J. : Vous avez chanté pour de nombreux orchestres philharmoniques, pourquoi avoir choisi la variété au lieu d’une carrière de chanteur d’Opéra ?

D.D. : Je ne voulais pas me cantonner à un style de musique spécifique. J’aime tout chanter. Je peux interpréter Carmina Burana comme des chansons de Mike Brandt. Tout chanter et passer d’une musique à l’autre est naturel en Israël. C’est un pays où toutes les cultures musicales fusionnent.

A.J. : Vous avez représenté Israël, lors de l’Eurovision 2004, vous avez été éliminé lors des demi-finales en Turquie, croyez-vous que le contexte politique d’Israël ait eu une incidence sur la décision des juges ?

D.D. : Je n’ai pas la réponse. Les Israéliens étaient très déçus. Ce n’est peut-être pas un vote contre Israël ! Ils ont peut-être juste préféré voter pour leurs pays voisins par affection...

A.J. : En 1997, vous avez participé avec l’orchestre symphonique Ra’anana, au spectacle intitulé, « Enfants de Dieu », dont le message est : « Aime ton voisin », est-ce ce message de paix que vous souhaitez adresser aux Palestiniens ?

D.D. : C’est un message que j’adresse à tout le monde. Je sais que la plupart des Israéliens sont pour la Paix. La haine est un fléau véhiculé par de nombreux leaders islamistes. De nombreux pays musulmans ne vivent pas dans un régime démocratique. Les enfants israéliens vivent dans un Etat démocratique où ils reçoivent une éducation libérale. Ils portent des tee-shirts où le mot paix se décline en toutes les langues. « Aimer son voisin », « respecter l’Autre » : voilà ce que l’on apprend dans les écoles israéliennes. Dans les écoles palestiniennes, on apprend à haïr le juif, à se sacrifier pour tuer le juif...Je suis tellement triste pour ces enfants palestiniens que l’on manipule ainsi. Que faire face aux attentats aveugles qui tuent nos enfants et nos femmes ! Bombarder mais bombarder qui ? Tuer avec le même aveuglément ? J’en ai assez que le reste du monde nous juge, ils ne vivent pas comme nous avec cette angoisse terrible à chaque instant. Prendre un café, prendre le bus pour accompagner ses enfants à l’école est un risque énorme. Jésus dit : « Ne juge pas ton prochain » ! Alors de quel droit nous juge-t-on ? S’ils ouvraient leurs yeux, ils verraient que nous sommes des Démocrates face à quelques fanatiques.

A.J. : Depuis des années, des groupes de musiciens israéliens et palestiniens se retrouvent le temps d’un concert, croyez-vous que la musique est un bon moyen de rapprocher les peuples ?

D.D. : La musique qui rapproche les hommes est une belle image symbolique. Je pense, en effet, que la musique peut aider celui qui est prêt à l’écouter mais toutes ces images négatives d’Israël, véhiculées partout, polluent les esprits et les cœurs.

A.J. : Vous avez également chanté devant le Pape, parlez-nous de cette rencontre...

D.D. : Le Pape m’a invité cinq fois à chanter au Vatican. J’ai été le premier chanteur israélien à chanter en hébreu devant lui. Les Israéliens m’ont surnommé avec humour : « le chanteur du Vatican ». Lors de ces représentations, j’ai chanté Alleluia, Ave Maria... Mais avant de chanter, je leur ai dit : « Pendant trois minutes, fermez les yeux et oubliez que je suis juif et israélien, laissez juste un cœur parler à un autre cœur ». Pour la première fois de ma vie, j’ai atteint une note incroyable et il y avait une telle émotion dans leurs applaudissements que c’est pour moi l’un des instants les plus magiques de ma carrière.

A.J. : Vous êtes né en Israël, vous avez fait votre armée, que ressentez-vous face au conflit israélo- palestinien ?

D.D. : Je pense qu’à l’heure actuelle, aucune paix ne pourra exister. Les soldats ne sont que des jouets dans un jeu de pouvoir. Barak a vraiment essayé de trouver une issue à ce conflit et pourtant les bombes ont continué d’exploser dans nos rues. Sharon fait ce qu’il peut pour résoudre ce conflit mais je ne crois pas qu’il y arrivera. En créant une barrière de sécurité, il tente de protéger sa population et regardez ce que cela provoque dans l’opinion publique européenne ! Dieu, quel que soit son nom, est le seul à pouvoir nous sauver à moins qu’un jour la vrai bonne volonté des peuples se réveille.

A.J. : Vous voyagez beaucoup, avez-vous souffert d’une animosité quelconque dans les différents pays que vous avez traversés face à votre nationalité israélienne ?

D.D. : En Italie, aux Etats-Unis, en Suède tout s’est bien passé. En Angleterre, le public était nombreux mais les cris d’une centaine de manifestants pro-palestiniens ont perturbé le concert. Une centaine de fanatiques qui faisaient plus de bruit que les 5000 personnes du public, c’est cela la réalité : c’est toujours les extrêmes qui se font malheureusement le plus entendre.

A.J. : Vous venez chanter en France, à l’heure où l’on poignarde un adolescent, juste parce qu’il est juif, que ressentez-vous face à ces actes antisémites qui se multiplient et quelle image a-t-on en Israël de la France ?

D.D. : La France n’a pas une très bonne image dans l’opinion publique et les Israéliens sont tristes d’apprendre qu’un enfant se fait molester à cause de sa kippa. Je sais à quel point la situation des juifs français est délicate et je veux vous remercier, au nom des Israéliens, pour votre courage et votre solidarité à défendre Israël. Il faut essayer de modifier la vision que les Français ont d’Israël et la musique est un bon moyen de le faire.

A.J. : Revenons à la musique, parlez-nous de ce concert que vous donnerez le 27 juin prochain au Bataclan...

D.D. : Je veux que ce concert ressemble à un grand voyage musical entre le classique, le jazz, mes compositions et quelques reprises de chansons françaises. J’aimerais que cela soit une grande fête ouverte à tous, juifs et non-juifs, réunis autour de la Musique.







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