Les Juifs dans les timbres
Les chemins de Sefarad
Chronique parue dans lArche n°485/juin 1998
Avec cette série de timbres émis le 28 novembre 1997, première
partie dun ensemble de vues touristiques intitulé « La
route des chemins de Sefarad », lEspagne nous propose un petit
voyage confortable et philatélique à la rencontre de son patrimoine
juif.
Depuis quelques années, les visites guidées de la péninsule
intègrent volontiers dans leurs circuits les « trésors
de lEspagne juive ». Nul palais pourtant, nulle forteresse de
brique rouge, nulle porte monumentale à se mettre sous le caméscope.
Simplement trois synagogues, et, ici ou là, quelques pierres, un
pan de mur, des lettres hébraïques, un fragment de décor
floral retrouvé dans une église. Même les Juderias antiques,
proprettes et rénovées, avec leurs maisons serrées,
leurs balcons fleuris et leur dédale de ruelles étroites et
obscures, nont plus de juif que le souvenir.
Première étape, donc, la Galice, avec Ribadavia, près
dOurense, capitale du vin de Ribeiro, dont les Juifs, nombreux dans
la région, faisaient le commerce. Le timbre représente une
des portes fortifiées de la vieille ville. Notre périple gagne
ensuite lEstramadure, avec un timbre qui nous montre la façade,
paraît-il typique, dune maison du quartier juif de Caceres.
Rien de très spectaculaire. Jaurais préféré
Trujillo, non loin de là, où dans larrière-boutique
dune pharmacie se cache linscription hébraïque:
« Voici la porte du Seigneur. Les Justes y entreront ». Ou encore
Hervas, plus au nord, dont la Juderia est le principal attrait, au point
quil est « curieux de noter, observe lOffice du tourisme,
la vivacité des souvenirs que conservent encore les habitants du
quartier sur son histoire juive ».
Un petit saut de timbre, et nous voici en Catalogne. A Gérone, le
call, le quartier juif, a été récemment restauré.
Gérone senorgueillit de son passé de talmudistes, de
mystiques et de kabbalistes, et surtout du plus célèbre de
tous, Nahmanide, qui y fut philosophe, poète et médecin. Son
nom en catalan, Baonastruc ça Porta, est aujourdhui celui du
Centre culturel. La ruelle représentée sur le timbre est sans
doute digne dintérêt, mais peut-être moins que
le petit mikvé de style roman, vraie rareté datant du XIIIe
siècle, situé dans la ville voisine de Besalu.
Lexcursion se termine, comme il se doit, à Cordoue, sa beauté
andalouse et sa célèbre synagogue, construite en 1315. Sous
un extérieur sobre, elle cachait des décors merveilleux, dont
ne subsistent aujourdhui que quelques panneaux de plâtre sculptés.
On remarque, creusée dans le mur oriental, la niche de lArche
sainte, et au-dessus de lentrée, la galerie des femmes, choisie
pour illustrer le timbre. Allons ! La route des chemins de Sefarad est ouverte,
elle est belle et ensoleillée, et il nous tarde de la suivre. Noubliez
pas le guide, sil vous plaît ! Claude Wainstain