Botvinnik et autres plantes
par Catherine Garson

RACINES : L’ORIGINE DES NOMS JUIFS

Chronique publiée dans L’Arche n°521/522 Juillet Août 2001

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Petit périple botanique et gastronomique pour comprendre l'origine du nom de famille Botvinnik et ses dérivés. Mais avant de parler plante et marmite, évoquons les origines géographiques et les différentes formes qu'ont prises ce patronyme. Dans ce qu'on appelait, à l'époque, l'Empire russe, et plus particulièrement à Pinsk, Minsk, Moguilev, Kiev et même Vilna, ce nom de famille compte d'innombrables variantes: Botvinkin, Batvinik, Botvinskij, Botvinikov, Butvinik, Boltsvinik ou Baltsvinik - pour ne citer qu'elles. Du côté de la Pologne, c'était la région de Varsovie, y compris Varsovie elle-même, qui abritait des Botwinka, Bocwinka, Botkinka et autres Botwinski.

Voyons la signification de notre appellation. Elle peut avoir plusieurs origines. Tout d'abord, le mot botva, qui désigne la verdure qui pousse dans les jardins potagers. Ensuite, le mot botvina en russe, ou son équivalent yiddish

botvine, qui désignent tous deux les feuilles des betteraves. Ou encore botwinka qui, en polonais, désigne à la fois les jeunes feuilles de betteraves et la soupe que les ménagères confectionnent à partir de ces feuilles.

Comment expliquer, maintenant, que ces plantes soient à l'origine d'un patronyme? À cette question, plusieurs réponses sont à envisager. Les ancêtres des porteurs de ce nom ont pu, à une certaine époque, faire le commerce des légumes; mais cela est peu probable, car ce commerce était plutôt l'apanage des paysans locaux. Autre possibilité: dans les tavernes tenues par ces mêmes ancêtres, peut-être servait-on une soupe particulièrement revigorante. Ou bien - moins romantique mais tout aussi plausible -, les autorités locales ont choisi d'appeler certains Juifs par ce patronyme, sans aucun lien avec leur activité.

Pour ce qui est des célébrités, signalons Mikhaïl Botvinnik qui vit le jour à Saint-Pétersbourg en 1911 et qui fut, par trois fois, champion du monde d'échecs. Il y a encore Naftali Botwin, né à Lvov en 1908, qui fut chargé, à l'âge de 17 ans, d'exécuter un traître infiltré dans le parti communiste polonais clandestin. Ce qu'il fit. Son silence, lors des interrogatoires et de son procès à l'issue duquel il fut exécuté, permit à sa complice de s'échapper en Palestine. Le nom de Botwin fut donné, en 1937, à une compagnie des Brigades internationales qui se battait en Espagne et comptait des Juifs dans ses rangs.

• CATHERINE GARSON

© 2001 L’Arche, le mensuel du judaïsme français (39 rue Broca, 75005 Paris).

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