Abou et Abdallah
par Catherine Garson

RACINES : L’ORIGINE DES NOMS JUIFS

Chronique publiée dans L’Arche n°520 Juin 2001

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Deux explications possibles pour le patronyme Abou (et ses dérivés), que l'on retrouve dans les trois pays d'Afrique du Nord sous des formes diverses, telles que About et Abbou, ou, précédé de l'index de filiation, Benabou, Benabo et Benabu. Aux origines, du côté des Berbères, ce patronyme serait un diminutif du prénom Abdallah, c'est-à-dire serviteur de Dieu. Pour ce qui est des Abou marocains, une autre interprétation voudrait qu'en arabe dialectal marocain ce terme soit employé pour désigner vantards et fanfarons. Inutile, dès lors, de préciser que, dans cette hypothèse, les ancêtres Abou ne devaient pas être des parangons de modestie.

En Espagne, ce nom de famille se disait Alabu. Le premier des Alabu dont l'histoire ait conservé la trace était propriétaire d'une maison dans le quartier juif de Pamplone, en 1367. Au Maroc, à Oufrane, se trouve le tombeau, datant probablement du XIe siècle, d'un des martyrs locaux, le tsadik (juste) Ouaish Ben Abbou. À Oufranne vécut aussi, au XVIIe siècle, un rabbin du nom de Shlomo Bar Abou dont la pierre tombale rappelle qu'il est considéré comme ayant fait des miracles de son vivant. Sans oublier, au passage, que Mimon Abbu fut le grand rabbin de Mostaganem, en Algérie, au XIXe siècle.
Mais c'est en Terre d'Israël, en Galilée, que l'on retrouve les Abbu les plus célèbres. Le premier se prénommait Shmouel. Né à Alger en 1789, il s'était établi à l'âge de 28 ans à Safed avant d'en devenir le grand rabbin. C'est aussi en ce lieu qu'il occupa le poste d'agent consulaire de France en Galilée, défendant la communauté juive locale et obtenant la nationalité française pour les immigrants d'Afrique du Nord.

C'est grâce à cela que - bien après sa mort, en 1879 -, lorsque la Turquie décida d'expulser les ressortissants des pays ennemis lors de la première guerre mondiale (elle était en conflit avec la France), des centaines d'originaires de Galilée trouvèrent refuge en Corse. Autre mérite de Shmouel Abbu: il acheta, à Méron, le terrain où était enterré rabbi Shimon Bar Yohaï dont il reconstruisit le tombeau. Précisons enfin que d'autres Abbu, dont ses deux fils, furent à sa suite agents consulaires de France à Safed.

• CATHERINE GARSON

© 2001 L’Arche, le mensuel du judaïsme français (39 rue Broca, 75005 Paris).

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